Projet II : Matériaux à empreintes moléculaires – Cargos polymériques - Biomarqueurs

Dans la nature, les interactions non covalentes forment probablement la base de la reconnaissance moléculaire. Des exemples de reconnaissance moléculaire naturelle comprennent les associations enzyme-substrat ou anticorps-antigène. Ces mêmes types d'interactions peuvent être incorporés dans un réseau polymérique pour produire un matériau capable de mimer la reconnaissance biologique, tout en maintenant de nombreux avantages pratiques. En effet, ces matériaux synthétiques (MIPs) montrent plusieurs avantages par rapport aux enzymes ou anticorps, incluant un prix de revient faible, des stabilités thermique et chimique supérieures, et un champ de reconnaissance moléculaire extrêmement vaste car la composition du polymère peut être adaptée à toutes les variétés de molécules.

L’empreinte moléculaire est une technique relativement nouvelle utilisée pour préparer un polymère qui se lie sélectivement à une molécule cible particulière. Une empreinte moléculaire est formée en plaçant une molécule « empreinte » (template) dans le mélange initial formé d’un monomère fonctionnalisé, d’un agent de réticulation, d’un solvant porogène et d’un initiateur. Ensuite, la polymérisation est déclenchée sous rayonnement UV ou par voie thermique. Ainsi, durant la réaction, le template est moulé dans le squelette du polymère qui croît. Lorsque la polymérisation est terminée et que le template est enlevé, le polymère peut sélectivement « reconnaître » et « adsorber » la molécule choisie comme empreinte dans une matrice chargée contenant plusieurs composés structurellement proches de celle-ci.

Ces polymères synthétiques de reconnaissance moléculaire sont dotés d’une haute spécificité pour la molécule modèle, tout en étant plus facile à utiliser et intégrer dans des dispositifs d’analyse et de délivrance de médicaments.

Notre équipe a ainsi développé un savoir-faire dans la conception, la synthèse et la caractérisation de polymères à empreinte moléculaire ou MIP pour la reconnaissance sélective de composés nucléosidiques ou nucléotidiques afin de pouvoir les analyser dans des milieux complexes, tels que les fluides biologiques. L’illustration qui suit montre le chromatogramme d’une urine humaine avant et après l’utilisation d’un MIP spécifique à la 7-méthylguanosine, biomarqueur des troubles du métabolisme purique humain.

Nous utilisons aussi la technologie de l’empreinte moléculaire pour vectoriser et  libérer de façon contrôlée des molécules de type nucléosidique. Le rôle de ce « cargo » polymérique est de protéger l’agent thérapeutique des défenses du corps humain (attaques causées par les anticorps humains), de le garder des réactions biochimiques dues à la présence de telles ou telles enzymes (estérases, hydrolases), de l’amener jusqu’à la cible pharmacologique et ensuite de le libérer de façon contrôlée. Nous travaillons sur cette nouvelle utilisation des MIPs pour relarguer un nucléotide dans la problématique du « epidermal turn-over » et d’un agent antiviral dans les infections virales aiguës de type Influenzae.

Un autre axe prioritaire de notre équipe concerne l’analyse qualitative et quantitative de nucléosides et nucléotides antiviraux dans les fluides biologiques humains. Cet axe appuyé par la récente arrivée du Dr. Si-Ahmed (Hépatologue, Praticien Hospitalier) au sein de l’équipe, nous permet de développer un axe translationnel de recherche qui met enfin en relation le chimiste qui crée le médicament et le clinicien qui l’utilise quotidiennement (From Bench to Bedside). Les buts recherchés étant d’établir la pharmacocinétique des nouveaux antiviraux utilisés, seuls ou en cocktail, contre les hépatites C et B, ou de chercher et doser des biomarqueurs nucléosidiques, chez des patients montrant des complications hépatiques telles que des cirrhoses ou des carcinomes hépatocellulaires.